C’était au début des années 2000, j’avais obtenu ma certification de guide nature depuis 2 ans et je commençais à encadrer mes premiers voyages aventure en Afrique du Sud. Natuellement, je concoctais des voyages que j’aime: la découverte par la marche, le trek et la randonnée, des explorations loin des sentiers battus. Et bien sûr le safari à pied!
Réserve d’Imfolozi en Afrique du Sud
J’ai un attachement tout particulier pour la réserve d’Imfolozi qui se situe dans la province du Kwazulu Natal en Afrique du Sud. Cette petite réserve d’à peine 90ha a un atout très fort, celui d’avoir préservé 30% de sa surface comme zone ‘Wilderness’, c’est-à-dire dépourvue de routes et de camps en dur. Ce secteur de la réserve est inaccessible aux véhicules et dédié exclusivement au safari à pied en immersion totale. C’est une région vallonnée, cisaillée par la rivière White Imfolozi, bordée de part et d’autre de falaises abruptes offrant des points de vues imprenables.

Un camp spartiate
Les camps utilisés durant ces safaris ne peuvent être plus spartiates: quatre tentes en dôme organisées en quart de cercle, avec lits de camps pour accueillir un maximum de 8 participants ; en face, une tente pour les 2 rangers armés et un peu plus loin une tente pour le cuisinier. Une toile tendue accrochée aux arbres abrite la table du cuisinier sur laquelle est entreposé l’équipement réduit au strict minimum pour préparer les repas et les servir ensuite aux clients.
Au milieu du camp, le coin feu autour duquel sont disposés quelques coussins à même le sol pour s’assoir puisque il n’y a ni tables et ni chaises. Ce camp sommaire est monté au milieu du bush, sans clôtures bien sûr, à quelques dizaines de mètres de la rivière. Pas de toilette ; pour cela il faut s’éloigner et faire son trou dans le sable avec une pelle. Quant à la douche, c’est un simple sceau monté d’un pommeau suspendu à un arbre par un système de corde et poulie à l’écart du camp et denuée de toute protection.
Il n’y a aucune route d’accès au camp. Il est à 2 heures de marche du camp de base où sont abandonnés les sacs et le gros des vêtements, qui sont inutiles durant le safari.

La belle époque avant le téléphone portable
A cette époque, qui n’avait pas encore vu apparaitre ni les appareils photos numériques ni les téléphones portables, lorsque nous partions pour 2 ou 3 nuits en safari, on était réellement coupé du monde pour toute la durée du safari et c’était formidable!
Car c’est bien là que réside l’objectif premier d’un tel safari. On recherche une immersion totale dans la nature pour se déconnecter de la routine journalière et se mettre au diapason de la nature. Pour y parvenir encore mieux, nous encouragions tous les participants à laisser également leurs montres au camp de base. Sans montre vous ne savez pas combien de temps vous marchez ni à quelle heure vous mangez pas plus que l’heure à laquelle vous allez vous coucher ou celle où vous vous levez.

C’est parti pour un safari à pied de 3 jours en immersion totale
Après donc avoir abandonné tout le matériel et l’équipement superflu, je pars, accompagné de deux rangers armés, avec 6 clients pour guider 3 jours et 2 nuits de safari à pied en immersion totale. Je souligne à ce stade qu’une telle activité se pratique en parfaite sécurité dès lors qu’elle est encadrée par une équipe professionnelle, ce qui était le cas (comme nos deux rangers aguerris vont pouvoir le prouver le deuxième jour…).
Imfolozi abrite tous les animaux phares du bush africain y compris les gros prédateurs (lions, léopard, etc..), éléphants, buffles, rhinocéros (en très grand nombre encore à cette époque), ainsi qu’une pléthore d’autres herbivores, oiseaux, insectes et reptiles.
Les deux premières journées se passent admirablement bien. Tout le monde, à juste titre, est ravi et très excité de vivre cette magnifique aventure. La nuit tombée, après avoir tous passés à tour de rôle à la douche de brousse (qui est une aventure en soit pour celui qui fait ce safari pour la première fois), nous voici assis autour du feu à nous remémorer les belles expériences de la journée et à écouter les bruits de la nuits…


Des éléphants viennent nous tenir compagnie pour le diner…
Tandis que nous humons les alléchants fumets de l’excellent repas qu’allait nous servir notre cuisinier, les silhouettes de trois éléphants apparaissent devant nous à quelques mètres à peine du feu de camp.
C’est une chose assez surprenante qu’un animal si massif puisse marcher aussi silencieusement sans éveiller l’attention. Ces trois pachydermes semblent ne poser à priori aucun danger, ce qui est habituellement le cas lorsqu’un éléphant s’avance de lui-même dans votre direction avec une attitude clairement paisible. En évitant les mouvements brusques et le bruit, il est ainsi possible de faire des observations très rapprochées. Des moments inoubliables!

Deux éléphants nous quittent assez rapidement mais le troisième reste, continuant à se nourrir des branchages à la périphérie du camp. Quant à nous, nous décidons de faire honneur au repas préparé, tout en profitant du spectacle live 3D! Le temps passe, et commençant à sentir la fatigue nous regagnons nos tentes respectives. Il doit être aux alentours de 21H00 (pas de montre je le rappelle).
Cependant, notre éléphant semble de plus en plus curieux et comme il se rapproche du centre du camp et des tentes, nos rangers restent autour du feu pour contrôler ses mouvements.
Il n’y a aucun danger de passer la nuit dans une tente en toile au sol, dès lors où la moustiquaire est fermée pour ne pas laisser rentrer les animaux opportuns. Les animaux passent parfois très près, au point de frôler la tente mais n’essaient pas d’y entrer, probablement alertés par notre odeur, en tout cas c’est ainsi dans 99.9% des cas…
Les choses se gâtent
Soudainement, nos deux rangers se mettent à taper sur les casseroles.
Aussitôt je me redresse et aperçois à travers la moustiquaire l’éléphant qui se montre curieusement intéressé par la batterie de cuisine et la tente de notre cuisinier, ce dernier visiblement inquiet et confus…
A juste titre car voici que notre éléphant, à reculons, qui fait basculer la table et tout son étalage, par la même produisant une cacophonie de vaisselle à réveiller tout le camp. Puis de la trompe il abat la toile suspendue au dessus de la table. Je le vois ensuite distinctement se diriger vers la tente du cuisinier, dans laquelle il n’y a personne, et la démonter à coup de pieds. Visiblement cet éléphant s’amuse comme un fou!
Les deux rangers sont guèrent amusés en revanche et décident de tirer un coup de semonce au-dessus de la tête de l’animal dans l’espoir de le faire fuir : sans effet!
Quand la retraite semble la meilleure chose à faire
Alors tout s’ accélère… En criant d’une voix forte et autoritaire, le ranger en charge de l’expédition demande à tout le monde de sortir immédiatement des tentes en abandonnant tout! Nous sortons en petite tenue (c’est à dire en slip et T-shirt) et nous positionnons derrière les tentes avec le deuxième ranger, tandis que l’autre reste près du feu pour tenter de contrôler la situation. Cependant l’éléphant se dirige maintenant vers la tente des rangers qu’il applatit également.
La situation devient critique. Aussi le ranger en charge donne l’ordre d’évacuer le camp! Nous partons ainsi dans le bush sans demander notre reste, en petite tenue, dans la nuit noire, un des rangers armés devant et moi derrière pour fermer la marche. Il faut savoir que nous ne marchons habituellement jamais de nuit en raison des dangers potentiels que cela comporte.
Nuit à la belle étoile au milieu du bush
Détail important, pour atteindre le camp, il est nécessaire de traverser la rivière Imfolozi, qui n’est jamais bien profonde mais qui au mois de mars peut monter à 50cm. Il y a des crocodiles dans cette rivière mais en traversant de jour et en faisant attention cela n’est pas un souci. Mais de nuit? C’est hors de question bien sûr! Nous sommes donc bloqués. Et sans route d’accès pour envoyer un véhicule de secours (que la ranger aurait pu alerter par radio si cela avait été une option), une seule solution, attendre ici jusqu’au lever du jour. Nous allumons un feu et nous agglutinons autour. Peu de temps après le deuxième ranger nous rejoint en nous apportant une brassée de couvertures très bien venues! Inutile de souligner que personne n’a fermé l’œil cette nuit là.
Retour au camp à l’aube

A cette saison le petit jour montre son nez très tôt, autour des 4 heures du matin. La nuit passe donc relativement vite. Aux premières lueurs, nous reprenons à la queue leu leu, le chemin du camp. L’éléphant n’est plus là. Mais quel spectacle! Toutes les tentes sont aplaties et déchiquetées et les habits éparpillés de ça de là tout au travers du camp.
Chacun récupère ce qu’il peut et nous repartons pour le camp de base, comme nous sommes venus, à pied. Nous achevons ce safari tout à fait extraordinaire dans une très bonne ambiance. Tous les membres de l’expédition sont rentrés enchantés par cette aventure exceptionnelle forte en émotions. Quelle aventure !
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